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INTERVIEW. Bruno Derrien décrypte l’arbitrage version 2018

Bruno Derrien (au centre) lors d’un quart de finale de Coupe de France entre l’OM et Metz, le 1er février 2006, à Marseille. (© MAXPPP)

 

Il est désormais hors des terrains de football, mais l’ancien arbitre international Bruno Derrien a accepté, pour Digital Sport, de revenir sur l’actualité riche autour de l’arbitrage. Suspension de la Goal Line Technology, prochaine mise en place de l’assistance vidéo et la récente affaire Tony Chapron… Bruno Derrien nous explique tout.

 

Vous avez écrit « SOS Arbitres – SOS Vidéo », la LFP vient de suspendre l’utilisation de la Goal Line Technology (GLT), était-ce nécessaire selon vous ?

Oui, à partir du moment où ce n’était pas au point et que ça ne fonctionnait pas très bien. Cela mettait les arbitres en difficulté plus qu’autre chose. C’est une sage décision. Il ne s’agit pas de remettre en cause le principe qui est bon, c’est le prestataire qui a quelques soucis, ils vont peut-être en tester un autre.

Est-on allés trop vite avec la GLT ?

Non, parce qu’elle avait été testée à la Coupe du Monde au Brésil en 2014 et ça avait fonctionné, c’était le même système. La Ligue l’avait donc pris, c’était aussi moins onéreux qu’un autre prestataire.

Pensez-vous la revoir dans un futur plus ou moins proche ?

Je ne sais pas. Si la vidéo est instaurée, est-ce que cela ne fera pas un double emploi ? Peut-être qu’ils essaieront les deux en même temps, mais je me pose la question.

Que pensez-vous de l’assistance vidéo qui arrivera en Ligue 1 la saison prochaine ?

Je faisais partie de ceux qui étaient pour, j’avais écrit un livre sur ce sujet. Depuis, j’ai vu comment ça fonctionnait et je suis devenu un peu dubitatif. C’est un peu trop tôt pour tirer des enseignements. Alors il y a des cas où la vidéo a apporté une aide. Dans le derby entre Monaco et Nice, la main du monégasque qui échappe aux arbitres aurait été vue par la vidéo et probablement que le but aurait été refusé. Mais très souvent, l’image n’apportera pas de vérité et ce sera à l’arbitre de prendre sa décision. Au final, il y aura toujours polémique et on déplacera le problème.


Vous vous disiez favorable à la vidéo, mais aujourd’hui vous êtes dubitatif. Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?

A l’usage, on voit que ça ne résout pas tous les problèmes. On voit aussi que ça peut casser le rythme de la rencontre, mais aussi l’ambiance. Cela enlève l’émotion, alors que le football, c’est de l’émotion. Il faut que la décision soit donnée le plus vite possible, 1m15, 1m30 c’est très long. Il ne faut pas non plus que l’arbitre se précipite, pour qu’il analyse bien les images. Le ressenti des arbitres sera important pour en tirer un premier bilan.

Vous êtes l’auteur des livres « A bas l’arbitre » et « Le bêtisier de l’arbitrage », comment avez-vous réagi au moment du geste de Tony Chapron ?

J’ai tweeté en disant que je ne comprenais pas. Je n’ai pas compris sa réaction et lui-même, je pense qu’il n’a pas compris, il a manqué de lucidité. C’est un geste superflu, qui ne s’imposait pas, je crois que c’est la première fois qu’on voit ça. C’est comme dans une cour d’école, vous vous faites bousculer, vous répliquez. C’est un geste de cour d’école. C’est peut-être aussi une forme de nervosité, de manque de sérénité chez les arbitres, qui sont sous pression.


Quelle sanction risque-t-il ? Cette saison devait être sa dernière, sa carrière est donc déjà compromise…

Je n’en n’ai aucune idée. C’est une première, je ne sais même pas s’il existe un code disciplinaire pour ça. En tout cas, je lui souhaite de revenir sur les terrains d’arbitrer quelques matchs avant sa retraite. Il ne va pas prendre cinq mois quand même… Il est déjà suspendu actuellement, il va être convoqué, mais j’espère pour lui qu’il ré-arbitrera.

 

Vous êtes plutôt actif sur Twitter, est-ce que vous pensez que cet outil permettrait aux arbitres de prendre la parole en public pour être mieux compris ou au contraire, que cela deviendrait un défouloir pour supporters en colère ?

Cela devrait être un outil de communication, c’est déjà le cas, je l’utilise parfois pour donner mon avis. Mais il m’arrive d’être insulté, parce que Twitter c’est quand même un torrent de haine et de violence. Twitter pourrait être un outil de communication pour les arbitres, mais pas dans le contexte actuel. Ou alors, ce doit être une communication contrôlée et institutionnelle. Mais est-ce qu’un arbitre viendrait sur Twitter pour s’exprimer ? Je ne suis pas sûr.

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